Bertolini: «Conduire des hommes, ça ne s’apprend pas à l’école »

07 oct. 2013

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Carlo Bertolini, vous êtes le responsable du service des arbitres d’élite au sein de l’association suisse. Entrons dans le vif du sujet: comment fonctionne la désignation des arbitres?

Carlo Bertolini:

Comme un cadre d’équipe ou de sélection, il existe un cadre d’arbitres de pointe. Nous définissons, avant le début de la saison, les besoins qualitatifs et quantitatifs pour la Raiffeisen Super League et la Brack.ch Challenge League.

Quelles sont les qualités d’un arbitre officiant dans nos deux ligues professionnelles?

Prioritairement, ce sont ses performances sur le terrain qui entrent en ligne de compte. Un autre élément indispensable est l’expérience. Si un arbitre est excellent, il lui faut absolument disposer aussi d’un capital expérience. Je dirais même qu’un arbitre doit absolument avoir

fait ses humanités

.

Cela signifie-t-il, en somme, que seules des personnes d’un certain âge entrent en ligne de compte?

Non, ce qui importe, c’est le nombre d’années d’arbitrage, l’âge auquel, il s’est mis à arbitrer. Quelqu’un qui a commencé l’arbitrage à 15 ans, possède déjà un certain vécu. La pratique fait fonction d’apprentissage. On n’a apprend pas à l’école à conduire des hommes, c’est la vie de tous les jours qui nous permettra de le faire. Des personnes exerçant des responsabilités dans la vie professionnelle sont toujours les bienvenues. Mais, je répète: plus vite quelqu’un emprunte la voie de l’arbitrage, mieux ça vaudra. Une carrière d’arbitre international n’est pas éternelle. La FIFA fixe la limite à 45 ans. Cependant, commencer l’arbitrage très jeune ne garantit pas non plus l’accession aux suprêmes honneurs. Comme dans la vie, il n’existe aucune certitude.

Parlez-nous des exigences physiques et psychiques de l'arbitrage!

Pour satisfaire aux critères de la FIFA, trois ou quatre entraînements hebdomadaires sont indispensables. À chaque match, un arbitre court quelque 11 kilomètres. Imaginez-vous que, comme pour une auto, il faille procéder périodiquement à des changements de pneumatiques ou d’huile. À la performance physique s’ajoute aussi la charge psychique. Maintenir un haut niveau sur tous ces plans est donc très difficile.

Revenons à la constitution de votre cadre. Combien d’arbitres en font-ils partie?

À l’heure actuelle, il me faut 18 à 19 arbitres. Le nombre dépend aussi des besoins quantitatifs de la FIFA et de l’UEFA. Plus on nous confie de parties à arbitrer au plan international, plus je devrai veiller à gérer le cadre. Il me faut donc rester flexible. Les modifications qui pourraient se produire au niveau du calendrier de la Raiffeisen Super League ou de la Brack.ch 

Challenge League - qui constituent notre quotidien - exerce évidemment une influence sur la consistance du cadre des arbitres.

Pour garantir l’approvisionnement du cadre en arbitres compétitifs, il vous faut compter sur un réservoir de talents. Où trouvez-vous vos nouvelles ressources?

De manière générale, nous avons un œil en particulier sur la 1re Ligue des amateurs. Nous ne prospectons cependant pas systématiquement des talents. Les informations nécessaires nous parviennent de différentes sources. Nous bénéficions, notamment, des évaluations des fonctionnaires du ressort Première ligue. Par ailleurs, même les médias nous rendent de nos jours attentifs à des arbitres intéressants. En engageant des arbitres de la relève en tant que quatrièmes officiels en Brack.ch Challenge League, nous établissons un premier contact de jeunes éléments prometteurs avec le football professionnel.

Ce qui veut dire qu’un arbitre peut provenir de 3e Ligue, par exemple?

Bien entendu, il est plutôt peu probable de passer directement de 3e Ligue en Super League, mais il n’y a pas de règle sans exception.

Et comment envisagez-vous l’entourage de ces arbitres au sein de votre cadre?

Dans un premier temps, chaque arbitre reçoit un «parrain», un mentor, qui est un ancien membre du cadre d’arbitrage, un ancien arbitre d’élite. Chaque mentor supervise l’activité de deux ou trois arbitres du cadre. Il est le premier interlocuteur de l’arbitre. Lors de chacun de ses matchs, l’arbitre du cadre est «coaché», soit par son mentor, soit par une autre personne compétente. Ensemble, ils analyseront les parties. L’arbitre bénéficie, ainsi, d’une base d’évaluation immédiate pour sa performance. À cette première analyse orale viendra s’ajouter, en cours de semaine, une analyse basée sur la vidéo.

Définit-on un procédé exact, des jours, des heures, des lieux, pour procéder à cette analyse?

Non, le calendrier est flexible. Il est fonction des disponibilités de chacun, arbitre comme mentor. N’oublions pas que chacun exerce un métier à côté de l’arbitrage.

  • Tout sur le rôle de l'arbitre ASF

Ne manquez pas la 2e partie de l’entretien avec Carlo Bertolini. Le chef de nos arbitres y évoquera le quotidien d’un de ses «sujets», les petits drames aussi. Carlo Bertolini nous dira notamment: «Malheureusement, je n’ai encore jamais vu un joueur consoler un arbitre.»

Ecrit parsk/es